Red Europea de Reflexión Geopolítica
Red Europea de Reflexión Geopolítica

Réseau européen de réflexion géopolitique/European network of geopolitical thinking





14 Juillet. Des nations européennes sans défense?


Jean-Paul Baquiast
Lunes, 18 de Julio 2011



La suggestion de Eva Joly, candidate de Europe-Ecologie-Les Verts à la présidence de la République française, visant à supprimer le défilé militaire du 14 juillet, a été assez généralement condamnée par l'ensemble des forces politiques françaises. Quoiqu'il en soit, ces forces politiques n'ont pas voulu aborder une question de fond, qui se pose aussi à l'ensemble des Etats européens: en quoi ces Etats, et derrière eux les nations qu'ils devraient représenter, ont-ils besoin d'une armée en état opérationnel?



La question se double d'une autre: les Etats qui, telle en principe la France, prétendent conserver une force de défense, peuvent-ils l'entretenir et l'employer sur un plan strictement national, alors qu'ils appartiennent à un ensemble géopolitique certes critiqué mais néanmoins cohérent qui est l'Union européenne.

Voyons d'abord la situation en France. Une première réaction à la proposition d'Eva Joly est venue du pouvoir. François Fillon s'est est pris personnellement à la personne de la candidate écologique, dans les termes que l'on sait. Mais la plupart des citoyens, espérons-le, ne se sont pas laissé prendre à ce piège électoraliste grossier. Comme le souligne le blog Honneur et Patrie, qui semble une émanation de l'establishment militaire (Une patrie sans honneur, ) les militaires et ceux qui plus généralement, y compris à gauche, soutiennent le principe d'une armée capable de défendre la nation en cas de danger, ne peuvent pas voir en Nicolas Sarkozy ou François Fillon les représentants des liens historiques entre l'armée et la nation. Non seulement Nicolas Sarzozy a réduit sans aucune perspectives à long terme les moyens des armées, mais surtout il a inféodé celles-ci, par l'intermédiaire de l'Otan, à la politique américaine. Les déclarations de circonstances faites à l'occasion des pertes militaires françaises en Afghanistan cachent mal le fait que ces pertes ne se produiraient pas si la France avait su, comme d'autres Etats européens, refusé de s'engager dans une guerre qui fut et demeure celle d'Obama.

A gauche, notamment au PS, mais pas seulement là, la sortie d'Eva Joly a permis de redonner voix et conscience à un vieux réflexe républicain qui associe de façon très forte l'armée et la nation. L'article précité d'Honneur et Patrie rappelle à juste titre ce lien, mais le sentiment est très largement partagé par les forces politiques et les militants de la gauche. Tout laisse espérer que si celle-ci accède au pouvoir, elle saura non seulement revivifier ce sentiment mais redonner aux politiques de défense, que ce soit au plan humain ou technologique, le minimum de moyens qu'elles ont perdus.

Il ne faut pas se dissimuler cependant que chez beaucoup d'électeurs demeure une méfiance à l'égard d'une armée qui sortirait de son statut de neutralité politique et d'obéissance aux institutions démocratiques, comme certains en avaient eu la tentation en 1960-62 dans le cadre de l'OAS dirigée contre de Gaulle. L'armée française ne semble pas vouloir retomber dans de tels errements, mais l'expérience historique des coups d'Etat et pressions de l'armée en faveur des partis les plus réactionnaires, tout au long du 19e et début du 20e siècle, doit légitimement inquiéter. Qui peut garantir que l'armée, en cas d'aggravation de la situation sécuritaire intérieure ou pour défendre une politique de conquête du pouvoir émanant d'un parti comme le FN, ne soutiendrait pas (avec ses puissants moyens matériels) les forces politiques les plus dictatoriales.

Manifestement, pour prévenir ce risque, les partis de gauche comptent sur le renforcement du lien entre l'armée et la nation, exploitant le concept de nationalisme républicain qui semble très présent dans l'encadrement et la troupe. La professionnalisation des forces armées, décidée à la suite de la déplorable décision de Jacques Chirac ayant abouti à la suppression du service militaire national, ne semble pas avoir coupé ce lien entre les militaires, leurs familles et le reste des citoyens. Nous pensons pour notre part d'ailleurs que pour renforcer ce lien, le futur gouvernement socialiste devrait rétablir ce service militaire, quel qu'en soit le coût. Les bénéfices en termes d'intégration social seraient tels que la dépense seraient pleinement justifiée...ce qui n'empêcherait pas de concevoir ce nouveau service militaire d'une façon plus valorisante que l'image courtelinesque s'attachant encore à lui: quelques mois d'encasernement à balayer la cour.

En quoi les nations européennes ont-elles besoin de forces de défense?

Il est vrai cependant que les perspectives de renforcement des liens entre l'Etat et la nation ne se posent pas qu'en France. La plupart des pays européens disposent (sans mentionner la Suisse) de forces armées plus ou moins efficaces. Mais celles-ci sont de plus en plus considérées comme inutilement coûteuses et sont donc de moins en moins bien intégrées à des sociétés qui semblent privilégier la consommation à courte vue et l'aveuglement sur des risques croissants.

Ne mentionnons pas l'illusion selon laquelle l'Europe pour sa défense devrait se remettre aux forces américaines au sein de l'Otan. Elle a encore cours dans beaucoup de milieux officiels européens inféodés à l'atlantisme, mais le repli croissant d'une Amérique en pleine crise contribuera il faut l'espérer à la faire disparaître, sans doute pas chez des dirigeants qui tels Nicolas Sarkozy en ont fait un enjeu de pouvoir, mais chez la majorité des citoyens.

Restera cependant à mieux définir les agressions éventuelles, voire les ennemis potentiels menaçant l'Europe, aujourd'hui et demain. Des conflits entre Etats européens semblent dorénavant impensables, mais d'autres menaces peuvent venir de gouvernements qui, pour renforcer leur cohésion et la mobilisation de leurs populations, s'en prendraient à telle ou telle nation européenne, voire à l'Union dans son ensemble. Les stratèges considèrent généralement en ce cas que les pays attaqués ne tiendraient pas 3 jours. Même la France, faute de pouvoir utiliser sa force nucléaire de dissuasion, serait en ce cas.

Cela devrait obliger à poser en termes nouveaux les moyens de la défense européenne, dans chaque pays et au niveau commun dans la mesure où celle-ci serait mutualisée. Mais il faudrait en fait que dans chacun des pays des contributions substantielles, non seulement à la défense européenne mais à la défense nationale, soient mises en place. Les arguments selon lesquels la crise ne permet pas de faire face aux dépenses correspondantes ne tiennent pas. Les opinions devront se résoudre à prendre en compte les sacrifices nécessaires aux diverses formes de guerre, y compris économiques, qui pourraient survenir.

A nouveau cependant se posera, cette fois-ci au niveau européen, la grave question de l'intégration des forces de défense européennes aux populations concernées. On pourrait, si cette intégration ne se faisait pas, craindre que des accords secrets entre ministres de la défense et ministres de l'intérieur réservent les forces armées à la lutte contre le développement de mouvements « révolutionnaires » légitimes, tels ceux des « indignés » si ceux-ci se généralisaient. Dans de telles perspectives, chaque militaire, quel que soit son grade, son arme et sa nationalité, devrait se rappeler qu'issu du peuple, il devrait refuser de porter les armes, chez lui comme chez les voisins, contre des mouvements eux-mêmes issus du peuple. Le même principe devrait d'ailleurs être admis par les personnels de police. Illusion lyrique, dira-t-on. Nous ne le pensons pas.


Nuevo comentario:
Twitter

Documents | Books | Events | Galicia 2011 | Declaración


European Network of Geopolitical Thinking
Eduardo Martínez
The European Network of Geopolitical Thinking, established in April 2011 on the Isle of Thought, Galicia (Spain), aims to contribute to the positioning Europe in the new global geopolitical context.

La reunión constitutiva de la Red Europea de Reflexión Geopolítica tuvo lugar del 26 al 29 de abril de 2011 en San Simón, Isla del Pensamiento, Galicia, España.


Geoeconomía. Blog de Eduardo Olier

Conocimiento. Blog de Fernando Davara

Inteligencia. Blog de Fernando Velasco


Files/Archives/Archivo
L M M J V S D
1 2 3 4 5 6 7
8 9 10 11 12 13 14
15 16 17 18 19 20 21
22 23 24 25 26 27 28
29 30 31        


Compartir/Partager/Share